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Introduction : une habitude qui divise

Certaines familles dorment ensemble sans problème.
Pour d’autres, le sujet est explosif :

“Elle dort avec son fils de 8 ans.”
“Il fait dormir sa fille dans son lit quand elle est chez lui.”
“Je trouve ça malsain.”

Ce débat, souvent silencieux, provoque des inquiétudes, des jugements et des malaises, surtout après une séparation.
Mais la question mérite d’être abordée avec nuance :
Dormir avec son enfant n’est pas en soi une faute, mais cela peut devenir un signe d’un déséquilibre émotionnel — selon le contexte, la fréquence, et la manière dont cela est vécu.


1. Pourquoi certains parents laissent (ou veulent) que l’enfant dorme avec eux

Après une séparation, la maison peut sembler vide.
L’enfant, lui, ressent souvent le même vide, mais à un autre niveau : insécurité, solitude, peur du noir, anxiété du changement.

Dormir ensemble devient alors :

  • une source de réconfort mutuel,
  • une façon de recréer le contact physique perdu,
  • un rituel protecteur pour l’enfant,
  • ou, pour le parent, une façon inconsciente de combler la solitude.

Ce n’est pas toujours un problème, mais c’est rarement neutre émotionnellement.


2. Quand la tendresse devient confusion

Le danger n’est pas dans l’acte en soi, mais dans la frontière floue qu’il peut créer.
L’enfant apprend à reconnaître :

  • son espace,
  • son intimité,
  • et la différence entre affection et fusion.

S’il dort trop souvent avec un parent :

  • il peut développer une dépendance émotionnelle excessive,
  • il risque de confondre proximité affective et besoin de sécurité,
  • et à long terme, cela peut gêner son autonomie ou sa socialisation.

Le lit parental n’est pas un lieu d’équilibre durable : c’est un refuge temporaire.


3. Le cas particulier du parent de sexe opposé

C’est souvent le point le plus sensible.
Une fille qui dort régulièrement avec son père, ou un garçon avec sa mère, peut susciter des inquiétudes légitimes — même en l’absence de tout geste déplacé.

Ce qui dérange souvent, ce n’est pas la réalité physique, mais le message symbolique :

  • L’enfant occupe la place émotionnelle d’un conjoint absent.
  • Il devient “le confident”, “le petit protecteur” ou “le pilier affectif”.
  • Cela peut créer un malaise inconscient, autant chez l’enfant que chez l’autre parent.

Ce malaise ne veut pas dire qu’il y a faute. Il indique simplement un brouillage des rôles.


4. Comment rétablir des repères sains

✔ Normaliser la séparation des lits

Expliquez à l’enfant que chacun a son espace pour bien dormir.

“Dormir seul, c’est grandir. Et moi aussi, j’ai besoin de mon sommeil.”

✔ Rassurer autrement

Lecture, câlin avant de dormir, présence rassurante jusqu’à l’endormissement — le lien se nourrit aussi hors du lit.

✔ Ne pas diaboliser

Évitez les jugements radicaux (“C’est malsain”, “C’est inacceptable”) : ils bloquent le dialogue et humilient le parent concerné.

✔ En parler calmement entre coparents

Plutôt que d’accuser, nommez votre inquiétude :

“Je sais que c’est pour la rassurer, mais j’ai peur qu’elle s’habitue trop.”
“Est-ce qu’on peut essayer de la faire dormir seule petit à petit ?”

✔ Chercher de l’aide au besoin

Un professionnel peut aider à distinguer le besoin affectif réel d’une fusion émotionnelle inconsciente.


5. Ce que l’enfant comprend, même sans mots

Un enfant sent quand il “remplace” quelqu’un.
Il peut aimer cette proximité, mais aussi en être prisonnier.
Il ne veut pas décevoir, ni blesser le parent seul.
Et sans s’en rendre compte, il devient le “gardien du sommeil” de l’adulte.

Lui redonner son lit, c’est aussi lui redonner sa liberté d’enfant.


Conclusion : l’amour rassure, mais ne doit jamais enfermer

Dormir ensemble peut être un moment tendre et ponctuel, mais il ne doit pas devenir un pilier de sécurité permanent.
L’amour ne se mesure pas à la proximité physique, mais à la capacité de donner confiance à distance.
Et quand le cœur du parent est solide, l’enfant apprend à s’endormir… sans craindre l’absence.

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